Mission B-Fast en Turquie : les experts de la Sécurité civile au cœur de l’aspect logistique

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Le lundi 17 avril s’est tenu le débriefing de la mission B-Fast (Belgian First Aid & Support Team) déployée en Turquie à la suite des violents tremblements de terre qu’a subi ce pays en février dernier.
Mission B-Fast montage d'une tente

À la suite de ces séismes, les autorités turques avaient envoyé une demande d’aide internationale au mécanisme de protection civile de l’UE (UCPM).  La Belgique a répondu à cette demande en envoyant un EMT-2 (Emergency Medical Team type 2, un hôpital de campagne).

Les équipes de la Protection civile envoyées sur place ont apporté un support logistique important à l’équipe médicale envoyée par le SPF Santé publique.  Au total, ce sont 27 experts de la Direction générale de la Sécurité civile (DGSC) qui se sont rendus sur place.  Ils sont issus des unités opérationnelles de la Protection civile de Brasschaat et de Crisnée.

La Direction générale de la Sécurité civile a tenu à rencontrer les participants à cette grande aventure humaine et à les remercier pour leur savoir-faire et leur engagement sans failles.

À l’ordre du jour, un débriefing de l’opération dans tous ses aspects : organisationnels, relationnels, structurels.  Le but était de récolter les informations de terrain et de tirer les enseignements de cette mission afin de pouvoir reproduire ailleurs les excellents résultats obtenus.  Cette mission s’est en effet révélée être une réussite.  Les échos reçus auprès des partenaires extérieurs à l’égard de la capacité opérationnelle de nos experts étaient très positifs !

Nous avons rencontré deux experts ayant participé à cette mission, Eric de Brasschaat et Fabrice de Crisnée.  Nous vous proposons de découvrir leur témoignage, leur ressenti à la suite de cette expérience hors du commun qu’il ont vécue.

Nos experts envoyés sur place dans le cadre de cette mission étaient donc au cœur de l’équipe logistique. Mais qu’entend-on exactement par « logistique » ? Ce terme désigne les innombrables tâches dévolues à cette équipe sans qui rien n’aurait pu être possible.  Pour le bon fonctionnement de l’hôpital de campagne, il s’agit concrètement du montage des tentes, de l’appui et de l’accompagnement au triage des patients vers les différents services médicaux, de la réception et de l’envoi de matériel, des achats pour les besoins vitaux du camp jusqu’à l’entretien des sanitaires ou l’aide en cuisine pour nourrir toute cette belle famille du B-Fast… En un mot : le soutien logistique consistait à faire en sorte que l’équipe médicale puisse travailler de manière sereine en se focalisant sur son objectif médical.

 

Chronique d'une mission

Fabrice

Le Caporal Benassi faisait partie du deuxième shift.  C’était sa première mission B-Fast.  Une expérience unique au service de grande causes qui font avancer humainement notre monde.  L’émotionnel faisait donc partie de ses bagages.Fabrice Benassi

Bonjour Fabrice, peux-tu te présenter en 2 mots ?

Je suis Fabrice Benassi, je suis caporal à la protection civile de Crisnée depuis janvier 2016.

Comment as-tu été sélectionné pour rentrer dans cette équipe ?

Alors, pour rentrer dans l'équipe B-Fast, il faut passer des tests.  Et remplir certaines conditions, donc dans l'ordre médical, avoir certains vaccins pour partir et dans l'ordre technique, faire partir faire partie d'un certains cluster.

Dans quel état d'esprit étais-tu quand on t’as annoncé que tu partais ?

Excité mais aussi avec plein d’interrogations parce que c'était ma première mission.

Concrètement, comment ça s'est passé ?

Alors pour l'équipe francophone, nous nous sommes donné rendez-vous ici à la caserne, vers 3h du matin.  Nous avons pris un véhicule jusque Peutie.

Et de là, nous avons rejoint d'autres personnes d'autres services : la santé publique, la défense et des logisticiens aussi.

On était tous assez excités, on voulait faire quelque chose et on voulait tous y aller.

Certains étaient déjà allés dans d’autres missions et vous aident à vous mettre dans le bain.

Certains collègues ont déjà participé à d'autres missions à l'étranger.

Ils nous aident, nous mettent un peu à l’aise, nous briefent un petit peu nous rassurent.

C’était la première fois que tu participais à une opération B-Fast.  Qu’en retiens-tu ?

Beaucoup de satisfaction personnelle et professionnelle aussi sur ce que j’étais capable de faire.  Et alors aussi humainement, c'est voir un peu le côté combattant des gens qui sont là-bas, ne se plaignent pas alors qu’ils ont tout perdu.

Vous êtes restés là une quinzaine de jours.  C’est passé vite ? Ca t’a paru une éternité ?

Oui et non parce que les journées étaient assez longues.  On débute à 6h00 du matin et on va se coucher vers 22 – 23h.  Ca nous faisait de très longues journées.  Mais court dans le sens où je pense qu'on aurait peut-être pu faire plus encore.  On a toujours envie de faire plus, on a toujours envie de venir en aide à un maximum de personnes qui sont dans le besoin.  Donc oui, il y avait peut-être ce sentiment que c'était peut-être un peu trop tôt.

Qu’auriez-vous pu faire de plus ? Vous êtes partis et l'hôpital est resté là.  Qui a repris l'hôpital ?

Ce sont les services locaux qui ont pris le relais de l'hôpital de campagne.  

Une petite question qui revient souvent.  On dit que la Belgique a encore été trop lente au démarrage quand on voit que certains pays étaient là après 24h.  Qu’aurais-tu envie de répondre à cela ?

On est arrivé sur place, on a effectué notre mission qui a duré un mois au total en deux shifts.  Non, je n’ai pas ce sentiment-là.

Comment pourrais-tu encourager tes collègues à rejoindre l’équipe B-Fast ?

S’ils se sentent dans l'âme, un peu ce côté Saint-Bernard, sauveur, qui voudrait se sentir utile je leur conseille vivement de de postuler dans le B-Fast et de de participer à cette aventure qui est qui est magnifique humainement.  Notre rôle est indispensable et indissociable pour un bon fonctionnement dans ce genre de mission car celui-ci permet au personnel médical d’exécuter leur mission d’aide aux patients dans de bonnes conditions sans se soucier des détails du quotidien…

Cette mission a été pour moi très enrichissante aussi bien d’un point de vue personnel que professionnel mais surtout humain par la solidarité, l’entraide dans cette équipe et aussi par la gentillesse, la reconnaissance mais surtout la force dont faisait preuve la population Turque dans cette tragédie, j’ai compris que j’étais dans le bon et que ce job est véritablement fait pour moi…

Je tenais à remercier cette équipe formidable dans laquelle nous retrouvons des personnes de tous horizons professionnels qu’il soit de la santé publique, de la défense ou de la logistique.

Fabrice as-tu quelque chose à ajouter ?

Ca a été vraiment une très très belle expérience pour ma part et que je ne regrette rien d'avoir participé à cette mission.

 

Éric

Eric Haesevoets

En Turquie, nous avons réalisé un exploit unique !

Relais d'un "MacGyver de la protection civile

B-Fast est déployé dans les zones sinistrées.  Notre intervention étant de plus en plus spécialisée, B-Fast est principalement déployé là où il peut apporter une valeur ajoutée.  L'assistance de plus en plus efficace est le fruit de l'expérience acquise lors des missions précédentes.  Eric Haesevoets possède aujourd'hui une grande expérience du terrain, avec 11 missions à son actif.  Nous revenons sur sa carrière et sur sa dernière mission en Turquie.

 

Pouvez-vous vous présenter brièvement et nous dire quel poste vous occupez au sein de la protection civile ?

Je m'appelle Eric Haesevoets et j'habite à Bekkevoort.  Je suis marié, j'ai une fille et une petite-fille.  Je travaille dans la protection civile depuis 1999.  En fait, mon rêve était de devenir pompier professionnel.  Mais j'avais déjà 31 ans, ce qui était trop vieux pour entrer dans le corps des pompiers.  Une personne qui travaillait dans un cabinet à l'époque m'a demandé pourquoi je ne devais pas postuler à la protection civile.  Pour être honnête, je ne connaissais même pas la protection civile.  Finalement, j'ai pu commencer à y travailler et je me souviens très bien de mon premier jour de travail, le 1er octobre 1999.  Je suis sapeur (officier opérationnel).  Je suis affecté au groupe CBRN (Chemical, Biological, Radiological and Nuclear), mais cela ne veut pas dire que je ne fais que cela.  J'assume aussi d'autres tâches : en riant, on dit parfois que nous sommes les "MacGyvers de la protection civile".  J'y travaille depuis 24 ans.  Ce qui me fascine dans mon métier, c'est la diversité des tâches.  On ne sait pas ce qu'on va faire le lendemain, parce qu'il y a une multitude de tâches et d'appels.

Comment êtes-vous arrivé dans l'équipe de B-Fast ?

J'ai rejoint B-Fast en 2000.  B-Fast en était encore à ses débuts.  J'ai posé ma candidature mais je n'ai pas été autorisé à commencer parce que j'étais actif dans la protection civile depuis moins de deux ans.  En 2001, il y a eu une formation à Brignolles pour les SD (sauveteur - salvateur) 1d .  J'ai été autorisé à suivre cette formation.  En 2002, j'ai eu ma première mission à Arles où il y avait une inondation.  Ensuite, nous avons roulé avec les pompes lourdes de la protection civile vers le sud de la France.  Depuis, j'ai participé à 11 missions, dont des inondations, des typhons, ...

Qu'est-ce qui vous motive à participer à ces missions ?

Je suis une personne sociale et je veux aider les gens qui sont dans le besoin.  Sauver les gens, c'est l'essentiel.  L'approche de l'Europe en matière d'aide d'urgence est nettement meilleure qu'auparavant.  Une aide ciblée est demandée, puis prise en charge.  L'aide appropriée arrive alors là où elle est nécessaire et pendant le temps nécessaire.  Si vous vous rendez dans une zone sinistrée, vous devez contribuer efficacement à soulager les besoins.  Vous devez faire en sorte que cela se produise.  Une équipe d'aide ne doit certainement pas être un fardeau supplémentaire pour la population locale.

Pouvez-vous décrire les circonstances dans lesquelles vous vous êtes retrouvé en Turquie ?  Quelle était la situation sur le terrain lorsque vous y étiez ?

J'ai trouvé les conditions pénibles.  Les bâtiments étaient terriblement endommagés, etc.  Nous étions à Kirikan. C'était une ville de 110 000 habitants avant le tremblement de terre et elle était presque complètement détruite. J'ai pu le constater grâce aux nombreuses missions que j'avais déjà effectuées, car j'avais déjà vu beaucoup de choses auparavant.  Les collègues qui voyageaient avec moi pour la première fois étaient encore plus impressionnés.  L'ampleur de cette catastrophe était vraiment immense.  Nous n'étions pas en Turquie pour une mission de recherche et de sauvetage.  Par conséquent, nous avions peut-être plus de recul.  Nous étions là pour un objectif très différent, qui consistait à mettre en place des infrastructures supplémentaires - un hôpital de campagne - dans un délai très court.

Quelles difficultés avez-vous rencontrées lors de la mise en place de l'hôpital de campagne ?

Bien sûr, il y a des difficultés et nous n'étions pas prêts à 100 % lorsque nous sommes arrivés sur place.  Néanmoins, ce fut une mission merveilleuse.  Nous avons littéralement commencé à construire l'hôpital à partir de la première pierre et, trois ou quatre jours plus tard, un hôpital de campagne complet était opérationnel.  Toutes les personnes présentes sur place ont fait un travail exceptionnel pour que cela se produise.

Comment s'est déroulée la coopération avec le gouvernement et le peuple turcs ?

J'ai été la première personne de la protection civile à me rendre sur le terrain, car je faisais partie de l'équipe d'évaluation.  Cela a duré trois jours.  Mes collègues sont ensuite arrivés.  Nous avons bénéficié d'une très bonne coopération de la part du consulat d'Ankara.  Par exemple, une personne détachée de la Défense nous a très bien aidés. Si nous avions besoin de quoi que ce soit (par exemple des cartes Sim), on s'en occupait.  Nous avons reçu l'aide dont nous avions vraiment besoin.  24 heures sur 24, 7 jours sur 7, nous avions un membre du personnel disponible, qui était sur place, qui parlait la langue et qui ouvrait aussi des portes.  Il y a eu une bonne coopération.

Nous avons également eu des contacts avec la communauté turque, mais plutôt pour conseiller les patients.  Ce qui était frappant, c'est qu'ils restaient optimistes malgré toute leur misère.  Nous pouvons parfois en tirer des enseignements.  Ce fut également une expérience positive dans ce domaine.

Avez-vous tiré des leçons (positives et négatives) de cette expérience ?

Le défi était de taille.  Le désastre était/est immense.  Il y avait aussi beaucoup de choses à acheter.  Le fait que nous ayons réussi à le faire est unique.  L'OMS (Organisation mondiale de la santé) qui était sur place a également été impressionnée.  Elle a estimé qu'il s'agissait d'une réalisation incroyable et stupéfiante.  Cette cohésion, ce travail pour un objectif commun.  C'est pour cela que nous le faisons.  Cela a vraiment aidé les patients.  Après trois semaines de fonctionnement, l'hôpital de campagne a été remis à une organisation sur le terrain.  Il est toujours opérationnel aujourd'hui.

En conclusion, quel regard portez-vous sur cette mission ?

Une très bonne expérience.  Si on me le demande, j'y retournerai.  Il y a une bonne coopération et un bon vent qui souffle.  Le soutien de la direction est également gratifiant.  Notre "chef" chez B-Fast, Pieter Wynant, se jette dans la brèche pour nous.  Entre-temps, nous disposons également d'un groupe logistique.  Celui-ci compte désormais 12 personnes et, en avril, une formation sera dispensée à d'autres personnes.  Ce grand groupe de personnes formées signifie que nous sommes toujours prêts à intervenir en cas de besoin.  Il s'agit d'une aide spécialisée qui s'ajoute à celle du personnel de B-Fast 1.